Configuration et EBOM

Le sujet central du PLM est certainement la gestion de configuration. La configuration d’un produit, c’est sa composition, c’est clair. L’objectif de la gestion de la configuration d’un produit, c’est donc être capable à tout moment d’en donner sa composition.

Mais la composition d’un produit, n’est-ce pas sa nomenclature ? La nomenclature, comme son nom l’indique, c’est la liste des noms des composants d’un produit, donc la liste des composants par leur nom.

Quelle est alors la différence entre configuration et nomenclature ? Simplement le fait qu’une nomenclature est statique, une expression à un instant donné, alors que la configuration est dynamique : sous l’impact d’une  modification, certains composants du produit évoluent et d’autres non.

Maîtriser la configuration d’un produit, c’est maîtriser les évolutions de sa composition, c’est-à-dire les évolutions de sa nomenclature, soumise aux flux des modifications.

Si nous revenons maintenant dans le cadre du PLM, nous ne nous intéressons qu’à la définition de ce qui doit être produit, le produit.

La composition du produit en objets matériels, ou plus brièvement en matériaux, est la nomenclature industrielle. Pour chaque matériau qui doit être produit, et ceci est valable pour le produit lui-même, sa nomenclature industrielle est la liste des matériaux à produire, produire s’entendant au sens large, soit « à fabriquer » ou « à se procurer ».

En anglais, un matériau est un material, une liste de matériaux est une bill of materials. Le mot bill, addition, renforce bien la notion de « matériaux à se procurer pour fabriquer quelque chose ». Une nomenclature industrielle est une Engineering Bill Of Materials, une EBOM. Le terme engineering fait référence au métier de l’ingénieur, l’ingénierie en français, l’activité qui consiste à concevoir quelque chose en vue de le produire. Nous sommes donc bien au cœur du sujet, et le fait que le sous-titre de ce blog sur le PLM soit l’ingénierie de l’ingénierie n’est pas rien qu’une coïncidence.

Nous entendons partout dans les milieux autorisés du PLM qu’il y aurait plusieurs BOMs : des RBOM (requirements pour exigences), des EBOMs (études, électrique, électronique…) , des CADBOMs (ça c’est facile), des MBOMs (manufacturing, bien sûr !) et sa cousine la PBOM (production) et encore d’autres xBOMs…

Les plus avisés discutent des structures de décomposition, les Breakdown Structures, qui en sont les sources à plusieurs niveaux: RBS, SBS, FBS, PBS, LBS, xBS… Il faut bien s’amuser un peu, non ?

Je pense pour ma part qu’il n’y a qu’une seule BOM, de laquelle il importe de maîtriser la construction, la publication, et les évolutions au cours du cycle de vie du produit : la EBOM, la nomenclature industrielle, la liste des matériaux à fabriquer ou à se procurer pour produire.

Je suis sûr que le plus grand enjeu du PLM est la maîtrise de la configuration industrielle d’un produit, c’est-à-dire des évolutions de sa nomenclature industrielle, sous le flux des modifications de sa définition.

Du point de vue outils, ceci apporte quelques contraintes :

  • il faut distinguer la EBOM des autres xBOMs
  • il faut implémenter le processus de gestion des modifications
  • il faut coupler les modifications aux états successifs de la EBOM
  • il faut relier les modifications aux possibilités de produire – toute modification de la EBOM n’est pas applicable immédiatement en production

Du point de vue organisation, la nomenclature industrielle est construite par le bureau des méthodes industrielles, en collaboration avec le bureau d’études. En effet, seul le bureau des méthodes est capable de connaître la liste des matériaux à fabriquer ou à se procurer pour produire, car celle-ci est le résultat de l’étude des procédés de production en rapport avec l’organisation responsable de cette production.

Un des grands défis de l’ingénierie de l’ingénierie, dit PLM,  n’est pas dans les mains des bureaux d’études et de leurs outils de conception, fussent-ils assistés par ordinateur, mais dans les mains des bureaux des méthodes industrielles, par la maîtrise de la configuration industrielle, dite EBOM, et je crois que ce fait doit ébranler beaucoup de convictions, je dirais même de croyances, bien établies dans le milieu.

Et vous, à quoi croyez-vous si je vous dit « configuration et EBOM » ?

11 Réponses to “Configuration et EBOM”

  1. Yoann Maingon Says:

    Je voudrais juste revenir sur un point du début : « Le sujet central du PLM est certainement la gestion de configuration ». Je ne pense pas que ce soit le sujet central du PLM. C’est le sujet central du PDM. Ensuite selon l’industrie concernée le PDM a plus ou moins d’importance. Le sujet central du PLM c’est le Produit, que ce soit une voiture, un parfum, une chemise, etc… Et c’est de cette façon qu’Aras innovator est né. Et plus le produit traité est complexe plus le besoin d’une solutions PDM proche de l’éditeur CAO sera nécessaire en complément d’Aras Innovator.
    Pour résumé ma vue du sujet central du PLM c’est l’interopérabilité des processus de l’entreprise concentrée sur la gestion de la valeur ajoutée de l’entreprise: les informations sur son produit.
    Je pense que les solutions PLM s’amélioreront nettement quand chacun fera le métier qu’il sait faire le mieux, PDM, BPM, qualité, gestion projet… Les standards et les éditeurs PLM doivent permettre l’intégration de ces éléments. (Et je pense personnellement que c’est la que les 3 grands éditeurs Dassault, Siemens et PTC échouent.)
    Désolé pour le commentaire un peu hors sujet.

    Cordialement,

  2. Hervé Menga Says:

    Merci pour votre commentaire, je ne comprends pas bien ce que c’est « l’interopérabilité des processus de l’entreprise », je ne parle que du processus de développement des produits quand je parle PLM.
    Permettez-moi de développer un peu mon point de vue sur la première phrase du billet.
    PDM, PLM, SGDT, CAO, informations produit, tout ceci ne nous dit pas à quoi cela sert. Et nous ne sommes pas aidés ni pas le charabia mâtiné de termes marketing à la mode des vendeurs, ni par le jargon orienté processus du métier du PLM, ni par les traductions difficiles entre l’anglais et le français.
    Les ingénieurs du siècle dernier concevaient des produits pour les fabriquer et les vendre à leurs clients. A cette époque, on ne parlait pas ni de CAO ni de PLM, et pourtant les produits fonctionnaient – quels que soient les produits, je suis d’accord avec vous.
    C’est vrai qu’hier les produits étaient moins complexes qu’aujourd’hui, mais la complexité d’un produit rend la conception de ce produit plus difficile, pas plus compliquée : les informations à manipuler sur un concept sont plus « tissées », plus « intriquées », pas forcément plus volumineuses.
    1. On a remplacé les planches à dessin par des systèmes de xAO, 2D puis 3D, la simulation numérique etc… C’est un saut technologique appréciable. On y a certainement gagné en qualité de la conception, en réduction de temps pour dessiner les concepts et les vérifier dans leur fonctionnement, et particulièrement en modifications, pour faire tourner la machine à concevoir plus vite. Nous sommes sur un palier aujourd’hui. Dans ce domaine de la conception (mécanique, pour simplifier), quel sera le prochain saut ?
    2. Qu’est-ce qu’on remplace par un système PDM ? Cela aussi, c’est un saut technologique. Qu’y gagne-t-on ? N’est-ce pas un peu court de parler de la gestion des « informations produit », quelles sont donc ces informations produit « gérées » par le PDM et à quoi servent-elles ?
    Mon point de vue de consultant PLM est que l’information produit conservée dans un PDM, et sujet du PLM, est sa définition, c’est-à-dire ce qui dessine la frontière entre un concept, résultat de la conception, matérialisé et modélisé, et le flou du fond informe, qui le rend « palpable », discernable par rapport au fond : concevoir pour fabriquer un objet qui doit fonctionner.
    Cette définition a plusieurs facettes, dont la plus délicate à maîtriser, c’est ma conviction, est la composition dynamique de la chose à produire, qui est même plus importante que la maquette numérique. Et c’est la raison pour laquelle je crois profondément que le sujet central du PLM, en tant que discipline, l’ingénierie de l’ingénierie, est la gestion de la configuration.

  3. Yoann Maingon Says:

    Je pense que nos visions diverges surtout sur ce que doit couvrir le PDM (pas forcément ce qu’il couvre actuellement). Apparemment vous n’intégrez pas toute la dynamique d’évolution de la structure du produit dans le PDM? vous la mettez dans le PLM? Attention le PLM ne concerne pas seulement l’industrie manufacturière et un produit peut-être un service.
    Je suis d’accord que l’utilisation de l’accronyme PLM dans un excès marketing (dont on devient tous collaborateurs) et sa trop grande proximité avec PDM n’aide en rien la compréhension de tous.

    J’ai fait un article sur « l’interopérabilité de processus » récemment.
    http://www.prodeos.fr/?p=1230

    et dans celui ci j’ai présenté (peut-etre trop succinctement) la limite entre PDM et PLM (le PLM intégrant le PDM):
    http://www.prodeos.fr/?p=1110

    J’ai une image au dessus de mon bureau qui pour moi définit bien le PLM de manière statique:
    http://tinyurl.com/3yt9g3v

    cordialement,

  4. Hervé Menga Says:

    J’ai répondu directement sur le blog prodeos.
    Je ne suis absolument pas d’accord avec le schéma qui définirait le PLM comme un ensemble de modules informatiques, bien arrangés comme dans une architecture de système informatique. Ca serait même plutôt une architecture typique d’un PDM.
    Je me répète, je vois plutôt le PLM comme une discipline, un métier comme on dit dans le milieu (du PLM)… Un des métiers de l’ingénieur, l’ingénierie de développement de produits et services : concevoir des systèmes d’information pour les mettre en place dans des organisations du développement de produits et services.
    Merci de votre intérêt et vos commentaires.

  5. Yoann Maingon Says:

    Je vois bien, et j’ai l’impression qu’on parle de deux choses qui ne sont pas contradictoires! C’est peut-être l’image de modules et le titre de l’article (PLM = BPM + ECM + PM + CMII + … (if standards == true)) qui laisseraient croire à tort que le PLM serait un simple lego. Heureusement pour nous consultants PLM, cet assemblage nécessite une intégration complexe et spécifiques à chaque développement produit qui je pense représente ce métier d’ingénieur de l’ingénierie dont vous parlez.

    cordialement,
    Yoann

  6. Hervé Menga Says:

    Oui, tout à fait.

  7. Muriel Says:

    Différence entre PDM et PLM, voila un sujet délicat.
    personnellement, j’ai beaucoup de mal à comprendre si l’évolution du PDM vers le PLM consiste à améliorer la connexion du PDM vers les autres briques du SI ou à mettre plus d’informations dans le « PDM ».
    si on penche vers la 2ème solution, ce qui me semblerait tentant serait de dire que toutes les nomenclatures du produit (comme conçue, comme fabriquée, comme maintenue…), actuellement gérées dans différentes briques (ERP…) pourraient être centralisées dans le « PDM » qui s’assurerait de leur cohérence et en assurerait la capitalisation dans le temps. Une boucle retour d’ enregistrements des produits physiques serait aussi intéressante. Le « PDM » devenu « PLM » aurait ainsi une vocation de référentiel produit central avec toutes les définitions du produit « théorique » et des retours effectués sur les produits physiques.

  8. Hervé Says:

    Merci de votre commentaire.
    Je ne crois pas qu’il y ait une différence entre PDM et PLM. Ces deux termes ont été employés à deux époques différentes, et parce que PDM est antérieur à PLM, on pourrait croire que PLM > PDM…
    Je pense aussi que la question n’est pas vraiment importante, il faut penser processus, et non pas données ou fonctionnalités.
    Nous parlons tous ici du processus de soutien au processus de conception de produit, alors SGDT, PDM, PLM ne sont que des mots…
    Pareil, je ne connais qu’une seule nomenclature de produit, c’est juste la liste des articles (composants du produit) à fabriquer ou à se procurer. A quoi servent les autres ?

  9. Muriel Says:

    concernant la signification du mot PLM, si elle ne s’intéresse « qu’à » la conception du produit, pourquoi parle t on alors de gestion de cycle de vie du produit? en fait, il faudrait dire gestion des évolutions de la définition produit?
    un cycle de vie est caractérisé par des étapes et des états de maturité.
    donc si on prend le « cycle de vie » du produit et donc toutes ses étapes (conception, fabrication, recyclage…), on ne peut se « cantonner » à l’étape de conception.

    concernant les différentes nomenclatures. si on prend par exemple, la nomenclature « comme fabriquée », elle inclut le produit mais aussi les « matières premières » qui servent à le fabriquer.
    pour un même produit « comme conçu », il pourra y avoir une gamme et une gamme alternative avec des procédés de fabrication différents qui n’auront pas les mêmes bruts. pour une nomenclature du produit « comme conçu », il y aura bien 2 nomenclatures du produit « comme fabriqué ».
    l’intérêt d’avoir plusieurs nomenclatures est aussi de gérer des sous ensembles différents selon les besoins (fonctionnels, de fabrication, d’achat). Si l’intérêt de créer différentes nomenclatures est réel, le besoin de gestion de cohérence de ces nomenclatures l’est aussi…
    et le logiciel PLM semble « bien placé » pour ca.

  10. Hervé Says:

    1. La traduction Product Lifecycle Management en « gestion du cycle de vie du produit » ne donne pas d’indication sur ce qu’est le PLM. PLM est un acronyme inventé par un vendeur de technologie, c’est un terme marketing.
    d’abord, cycle de vie ne veut rien dire en français. pourquoi cycle ?
    Ce qu’on peut tout de même retenir de « lifecycle », c’est que le PLM est le système de soutien du processus de conception du produit dans toutes les phases de la vie d’un produit (en conception, en réalisation, en usage, en retrait), mais que le PLM ne s’occupe que de la conception de ce produit – conception fonctionnelle, mais aussi conception des processus de fabrication, de soutien logistique; à un moment on parlait de conception « produit-process », mais c’est toujours de la conception, et pas de la réalisation.
    Ce n’est pas parce que le statut du produit évolue au cours de sa vie (et non pas au cours de son cycle de vie) que le PLM ne soutien pas autre chose que la définition de ce produit, et rien d’autre. C’est d’ailleurs pour cela que les modifications (change) que traite le PLM ne sont que des modifications d' »ingénierie » (entendons de « conception »), c’est à dire des modifications de la définition – même si le produit est à ce moement déjà « en fabrication » ou « en usage »…

    2. Vous parlez de nomenclature « comme fabriquée »… Vous voulez certainement parler de la nomenclature industrielle, qui est la liste des composants à fabriquer et à se procurer pour fabriquer le produit. Soit. Et c’est la seule nomenclature « intéressante », toujours d’un point de vue processus.
    En outre, si deux « bruts » servent à faire le même produit, vous ne pouvez pas considérer que l’article final qui est produit porte le même numéro (même si du point de vue du client, il s’agit du même produit, il ne s’agit pas du même article), sinon vous ne pourrez pas les différentier dans vos processus de fabrication… du coup, vous aurez bien des compositions d’articles finis différentes pour un même produit livré… Les nomenclatures dites « de fabrication » ne sont qu’une pirouette informatique, au bout de la chaîne de production, vous n’avez qu’un seul article physique avec une seule composition.
    Pouvez-vous me dire par exemple à quoi sert une « nomenclature » fonctionnelle et comment elle pourrait être faite ?
    Il faut absolument raisonner processus et non pas données, car seuls les processus sont invariants, les données ne sont que des résultats de ces processus (des « produits d’activité » comme on dit en CMMI) ; seuls les processus donnent le pourquoi des activités, pas les données.

  11. ARAMIS Says:

    Dans toutes les solutions logiciel de définition/conception produit : mécanique, électrique, soft etc… on retrouve des fonctionnalités de PDM qui permettent de caractériser le produit (gestion à connotation « statique ») et ses configurations, au file de l’eau du processus de modification(gestion à connotation « dynamique »). L’élaboration d’une solution de produit complexe intégrant à la fois des parties mécaniques, électriques et softwares (softwares embarqués par exemple) impose pour le moment de jongler entre ces différents PDM spécialisés « métier ». L’état de l’art renforce cette idée d’Hervé qu’il faut absolument raisonner processus et non pas données car seuls les processus sont invariants, les données ne sont que des résultats de ces processus. La gestion des résultats des processus de gestion de configuration de chaque composant d’une solution de produit complexe, c’est peut être cela le PLM, une gestion de« poupées Russes » de composants gérés dans des solutions PDM hétérogènes mais interopérables avec le PLM… Cela étant, sur le fond, suis bien d’accord que PLM c’est avant tout du Business, car pas vraiment de différence avec PDM, SGDT, ERP et autres machins. Pour finir sur une note plus positive, PLM, c’est peut être un état d’esprit, orienté produit/client avant tout !

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